quelques nouvelles du facteur
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ouest-france - 23 septembre 96

Jacques Rebotier présentait sa dernière création brestoise : Quelques nouvelles du facteur. Époustouflant, drôle, magique !

Jacques Rebotier est un magicien. Il aime jouer avec les mots, les sons, l'espace. Entre parenthèses, on regrettera les circonstances qui l'ont empêché de créer, au début de l'été 1995, sa Chambre de veille, cette performance de la parole dite pendant 24 heures, du haut d'un phare en pleine mer, le phare de Kéréon, au large de l'île d'Ouessant, et transmise par liaison radio sur la scène du Quartz. Qui sait. Peut-être qu'un jour, on entendra cette voix.

En attendant, le compositeur, comédien et metteur en scène, avec la complicité de Virginie Rochetti, scénographe, nous offre, dans le spectacle qu'il vient de créer à Brest au Quartz, un festival poético-musical époustouflant. Jacques Rebotier, c'est lui le facteur qui, de la salle, bondit de temps en temps sur la scène, sort un bout de papier, et, tente de livrer un message. Vite, très vite. Bonnes ou tristes nouvelles. Des histoires intimes, des confessions de personnes qui ont envie, qui voudraient... histoires interrompues, brèves de vies, bribes de Jules ou de misères.

Impossible de communiquer ? Ah ! Mais si ! Et hop ! Il suffit de passer le relais aux musiciens. Et les voici les musiciens, qui prennent les mots, se les mettent en bouche en même temps que leur instrument, et les ressortent en musique machée. Cela marche très bien avec les cuivres, les vents. C'est plus difficile avec les cordes qui, bien sûr, n'ont pas de contact direct avec la bouche. Mais enfin, tout l'art du musicien consiste à faire entendre à l'instrument sa propre voix, pour qu'il la reproduise et transmette le message. Les sons peuvent être discordants, mais tant pis.

Il y aura comme ça 66 brèves de vie pour musiciens-récitants - acteurs remarquables - et presqu'autant d'instruments différents, du trombone à l'accordéon en passant par la trompette, le violon, le tuba, le cor des Alpes, des criquets, fouets, pendules, toupies sonores, boîtes à mouton, à vache et à rire... Des Brèves pour photographe danseuse aussi. Sans doute quand il n'y a plus d'autre solution que celle de communiquer avec son corps et en anglais !

On s'amuse énormément à ce spectacle qui, s'il est parfois redondant - mais c'était la première vendredi soir - va au delà des mots et des sons, distille de l'émotion. Chouette fin de soirée.

Pierre Gilles

 

libération - 25 septembre 96

- Extraits

.../ Cette variation en mineur pour six acteurs instrumentistes (trombone, tuba, cor, violoncelle et autres boîtes à rire) - dont l'auteur - n'est pas pour autant une récréation dans l'œuvre de Rebotier. Obsessionnel, ce dernier taille comme à son habitude dans le tissu verbal quotidien, traque la musique dans les mots et le sens dans les sons, fait son miel d'une scène de ménage ou d'une coupure de journal, retranscrites illico en partitions pour "trombone, serpent, criquets, grenouilles (...)" et même "réveil-soir".
En une heure-vingt, il enchaîne les gags et les expériences, les trouvailles et les ratés, à cloche-pied ou à quatre pattes sur la lisière du théâtre et de la musique.

R.S.