réponse à la question précedente (1993)
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le monde - 3 décembre 93

" Qu'est-ce qui sort du cerveau quand on appuie dessus?… A qui peut-on parler quand on n'a rien à dire ?… Allez, parle! C'est à toi, maintenant !.. Qu'est-ce qu'il y a sous les mots quand on enlève la pensée ?… " Ils sont trois, serrant les dents, hagards, accrochés à leur caboche comme des coureurs à leur guidon dans les ultimes secondes du sprint. Non, ils ne sont pas trois, ils sont un seul dingue à trois voix dans la tête d'un musicien qui s'est vu confisquer son piano, son violon, ses partitions, qui s'est vu confisquer les notes, la musique, tout, et qui essaie de crier de la musique sans musique, avec juste des mots sans rime ni raison qui déboulent dans le vide. Super-tragique, super-comique. Le couloir de la mort dans un parc d'attractions. Marie Pilier, Emmanuelle Zoll, Alain Fromager, provoquent les rires jusqu'à l'apoplexie.

Michel Cournot

 

le figaro - 20 décembre 93

La scène se passe dans une boîte - un crâne, un préau, un théâtre. Les personnages sont trois : Cerveau, Cervelle et Cervelas. Les acteurs (Alain Fromager, Marie Pillet, Emmanuelle Zoll) jouent au ping-pong avec les mots. C'est une activité saine et parfaitement recommandée à la jeunesse. On peut se présenter devant le public en pyjama avec un pliant.

Les acteurs s'enchantent de toutes les variations du phrasé, de l'articulation, de l'intonation, du rythme. Ils tirent sur toutes les ficelle du lexique. Soudain, l'un d'eux hurle "Corde ! " comme pour épuiser le mot et transgresser un tabou théâral. Les mots chahutent, clignent, jouent, chantent sans queue ni tète : poubelle, camion, caramel, coq, karma, carmel. Les mots ont un penchant pour la scissiparité : pipi, papa, tutu, bonbon, dodo. L'avantage avec les mots, c'est qu'il y en a beaucoup.

Dans le sillage de Queneau et Tardieu, Jacques Rebotier soulève les jupes de la langue française et met un beau nez rouge au dictionnaire. Au bout d'une heure, repu de secousses et d'onomatopées, ivre de catachrèses, de rimes et de très relative déraison. on a envie de crier : pouce ! On tourne en rond, poil au menton.

Mais, bon, on ne va pas dire du mal du théâtre quand il est enfantin, sonore, étymologique, scolaire, grammatical ! On serait déconsidéré.

Frédéric Ferney